Il est minuit passé quand elle est rentrée dans le bar avec ses amis en scandant "A poil les gens, c'est la fête!". Enfin un peu de temps pour elle, elle en profite à 100%, à sa manière, mais elle en profite. Elle n'a pas souvent le loisir de sortir explique-t-elle, assise sur le bord d'une marche dehors, fumant une blonde offerte par un copain d'un soir fréquentant aussi ce bar.
"Je suis saoûle mais bordel ça fait du bien de rigoler, pour une fois... Faut bien décompresser quand on doit s'occuper de sa grand-mère, de sa mère et de son frère. Ils ont tous besoin de moi et moi je dois rester, tu vois, droite, super droite. Droite comme… comme… comme la gouttière de l'autre côté de la rue !" Elle explose de rire, tout le monde s'amuse aussi de sa comparaison farfelue. "Ouais, mais tu vois, je suis comme la gouttière parce que faut que j'évacue toute la merde qui découle de leur vie. Si je tiens pas le rôle de la gouttière, ils se noient tous dans leur merde. Voilà pourquoi je suis comme la gouttière. Mon frère, avant, c'était le plus beau mec du monde. A 18 ans, ça lui a claqué à la gueule, dépression, paranoïa, on le dit même schizophrène. Le genre de maladie qui se voit pas, que les gens ne comprennent pas. Il a maintenant près de 30 ans et il est toujours malade. Tout ce qui m'aide, moi, pour supporter tout ça, ce sont des assos. Les psys, l'Etat, tout ça, ça sert plus à rien, on n'a plus qu'à se raccrocher à nous-même, à notre petit groupe social pour tenir le coup."
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